Le racisme et les savants

Le racisme et les savants

 

La première évocation connue de classification raciale remonte à la fin du XVIIe siècle, lorsque François Bernier (1620-1688) publie dans le journal des savants du 24 avril 1684 un article intitulé « nouvelle division de la terre par les différentes espèces ou races d’homme qui l’habitent ».

Dans cet article, le philosophe et voyageur présente une tentative théorique de diviser l’humanité en « races », s’appuyant sur des attributs physiques considérés comme immuables. S’il ne va pas jusqu’à hiérarchiser les races, il place bien évidemment les Blancs devant les autres.

Cette première tentative ouvre une ère – qui s’étendra jusqu’à la première moitié du XXe siècle – pendant laquelle va se développer cette idée de supériorité de la prétendue « race blanche ». Cette croyance en l’inégalité biologique et psychique des « races » humaines a inspiré bien des discours en étant reprise par les hommes politiques.

L’anthropologie « raciale » constitue la pierre angulaire de cette argumentation prétendument scientifique autour de laquelle se greffent plusieurs grands débats comme celui sur les origines de l’Homme (monogénisme ou polygénisme ?), la création du monde (créationnisme ou transformisme ?) ou bien la capacité d’évolution des « races  inférieures » (perfectibilité ou décadence).

 

L'anthropologie physique

Définie comme histoire naturelle de l’homme, l’anthropologie est la « science qui a pour objectif l’étude du groupe humain considéré dans son ensemble, dans ses détails et dans ses rapports avec le reste de la nature »(1). Elle a trois ambitieuses missions.

L’anthropologie, qualifiée de « zoologique » a pour objectif d’étudier les rapports entre le genre humain et le règne animal. Il s’agit d’ « examiner les caractères communs à l’homme et aux animaux les plus rapprochés de lui et les caractères qui lui sont exclusivement propres » (2).

Elle entend aussi pleinement participer au grand débat intellectuel du XIXe siècle sur les origines de l’homme qui opposent les partisans des théories créationnistes issues de la Bible à certains naturalistes séduits par les théories transformistes. Cette première mission qui a pour objectif de discuter la pertinence des thèses transformistes(3) est loin d’être étrangère à la représentation des races humaines. En effet, précise Broca, il conviendra de marquer la « distance qui existe entre les termes les plus élevés de la série des singes et les plus inférieurs de la série des hommes »(4).

« Le groupe humain une fois caractérisé, circonscrit et classé comme un groupe d’ensemble, il s’agit de le considérer en lui-même, d’y établir des divisions, des subdivisions, et d’étudier ensuite séparément chacun de ses groupes partiels »(5). L’étude des races humaines, qualifiée d’ « anthropologie descriptive » ou d’ « ethnologie », apparaît comme la seconde mission de l’anthropologie. Les caractères physiques sont considérés, aux yeux des anthropologues dont la plupart sont de formation médicale, comme les caractères les plus pertinents et donc les plus fiables pour aboutir à une classification scientifique. Si les études anatomiques constituent la base de cette « histoire naturelle de l’homme et des races humaines », l’anthropologie se conçoit également comme la science des peuples, de leurs mœurs, coutumes, institutions, aptitudes. Enfin, la troisième branche, « l’anthropologie générale […] embrasse dans son immense domaine des sujets très divers »(6): elle intègre ainsi la recherche des origines de l’homme et de la formation des races humaines, les études sur la capacité d’acclimatation, la perfectibilité, les différentes aptitudes « intellectuelles, morales et sociales », etc. (7) »

La République Raciale, Carole Reynaud Paligot, p.12-13, Éditions PUF, Octobre 2006

 

De la classification…

 

Un des premiers scientifiques à établir la similitude anatomique entre l’Homme et le singe est l’Anglais Edward Tyson (1650-1703). Il est suivi dans les années 1740 par Linné, qui classe l’Homme dans une espèce au sein du règne animal. En France, Louis Jean-Marie Daubenton (1716-1800), médecin et collaborateur de Buffon, effectue les premières recherches craniométriques tandis que Pierre Camper (1722-1789) met au point l’angle facial.

 

…à la hiérarchisation

 

Les travaux de la génération suivante introduisent progressivement au sein de ces classifications la notion de hiérarchisation. L’Anglais Charles White (1728-1813) voit dans les différentes mesures et observations qu’il effectue une graduation parfaite entre l’Européen, l’Asiatique, l’Américain, le Nègre et les singes. En France, Buffon note de troublantes ressemblances entre les singes anthropomorphes et le « dernier des hommes », c’est-à-dire le Hottentot.

 

La relation entre l’angle facial et le développement cérébral

 

En 1795, Georges Cuvier (1769-1832) et Étienne Geoffroy-Saint-Hilaire (1772-1844) établissent une relation entre l’angle facial et le développement cérébral : l’amplification de la face, c’est-à-dire des mâchoires, se fait au détriment de l’essor du cerveau ; plus l’angle est ouvert, plus le cerveau est développé et donc plus le sujet est intelligent.

 

L’infériorité anatomique du Noir

 

Julien Joseph Virey (1775-1846) vulgarise cette idée de hiérarchisation des hommes et présente l’infériorité anatomique du Noir : sa capacité crânienne inférieure, son cerveau plus étroit, ses hémisphères cérébraux moins volumineux, ses circonvolutions moins nombreuses et moins profondes, son appareil nerveux plus important, etc.

 

La supériorité de la capacité crânienne du Blanc

 

Le phrénologiste Franz-Joseph Gall diffuse la notion de déterminisme cérébral en défendant l’idée d’une étroite corrélation entre la forme du cerveau et la pensée, et en cherchant à localiser les dispositions morales et intellectuelles à un endroit spécifique du cerveau. Aux États-Unis, Samuel George Morton (1799-1851) montre la supériorité de la capacité crânienne des Blancs et Josiah Clark Not (1804-1873) utilise ces données pour justifier l’esclavage encore en vigueur dans les États du Sud.

 

Le doute sur la capacité des peuples primitifs à évoluer

 

Considérant que les aptitudes intellectuelles sont héréditaires et spécifiques à chaque prétendue race, tout en n’excluant pas l’option lamarckienne de transmission des caractères acquis et l’influence de l’environnement, Paul Broca et ses disciples affirment que la perfectibilité est très inégalement répartie parmi les prétendues « races humaines » et ils demeurent très pessimistes sur la capacité des peuples primitifs à acquérir la « civilisation ». Partisans de la doctrine de l’évolution, ils voient dans les populations primitives le chaînon manquant entre l’anthropoïde et l’homme civilisé.

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(1) « Les monogénistes, chrétiens convaincus, ennemis de Darwin et de sa théorie de la sélection naturelle, main sur la Bible, estiment qu’Adam et Ève sont l’unique origine de l’homme. Alors, pourquoi et comment ces deux ancêtres originels et leurs deux enfants ont-ils eu des descendants de plusieurs couleurs ? Très simple, répliquent-ils. L’expulsion du paradis a conduit certaines hommes (les Noirs) à une dramatique dégénérescence, tandis que d’autres (les Blancs) n’ont subi que des dégâts sans gravité. Le péché originel aurait donc touché davantage les Noirs que les Blancs. » Mes Etoiles Noires, p. 142

 

(2) L’autre courant est celui des « polygénistes », libres-penseurs et «progressistes». Ce qu’ils défendent, ce sont les « vraies » valeurs républicaines. Pas question d’adhérer aux idées bibliques ni à celles, réactionnaires et aristocratiques, exposées par Gobineau dans les quatre volumes de son Essai sur l’inégalité des races humaines ; leur approche est moderniste, républicaine et démocratique. Ils se posent à l’avant-garde des recherches et des théories scientifiques, et ils osent défier la Bible en affirmant que les Blancs et les Noirs sont des races différentes.  Mes Etoiles Noires, p. 142

 

(3) Broca, 1866, 1989, 9

 

(4) Ibid. 4-6

 

(5) Cf. Chapitre 2, La République raciale, Carole Reynaud Paligot, Editions PUF, Octobre 2006

 

(6) Broca [1886], 1989, 5.

 

(7) Ibid, p.6

 

(8) Ibid p13.

 

(9) Ibid. p.10 – 41.

La société d'anthropologie de Paris ou l'anthropologie physique institutionnalisée

anthropologie_physique

 

C’est dans les années 1860-1870, sous l’impulsion de Paul Broca, que l’anthropologie physique acquiert une véritable autonomie disciplinaire et s’institutionnalise grâce à la création d’une société savante, la Société d’anthropologie de Paris, d’une école, l’École d’anthropologie de Paris et de plusieurs revues.

Broca donne d’ambitieuses missions à la nouvelle science de l’homme. L’anthropologie qualifiée de « zoologique » a pour objectif d’étudier les rapports entre le genre humain et le règne animal, d’étudier les caractères communs à l’homme et aux animaux les plus rapprochés de lui mais aussi de marquer la « distance qui existe entre les termes les plus élevés de la série des singes et les termes les plus inférieurs de la série des hommes ». L’étude des prétendues races humaines, qualifiée d’ « anthropologie descriptive » ou d’« ethnologie » apparaît comme la seconde mission de l’anthropologie. Enfin, la troisième branche, « l’anthropologie générale » embrasse des sujets très divers : elle intègre ainsi la recherche des origines de l’homme et de la formation des prétendues races humaines, les études sur la capacité d’acclimatation, la perfectibilité, les différentes aptitudes « intellectuelles, morales et sociales », etc. (Broca, 1989, p.5-41).

La raciologie de Broca se rattache à la tradition républicaine. Contre ceux qui entendent laisser la sélection naturelle agir, il réaffirme que la société doit protection à ses membres et notamment aux plus faibles d’entre eux, et défend le droit à l’éducation. Refusant le constat de dégénérescence de la société française, il entreprend de démontrer scientifiquement que la population française n’est ni affaiblie, ni décadente et il refuse d’affirmer la supériorité des dolichocéphales blonds sur les brachycéphales bruns tout comme de souscrire à l’antisémitisme. Il se démarque ainsi de la dimension antidémocratique et antimoderniste de la pensée d’un Lapouge ou d’un Gobineau. (1)

Pour Broca et ses disciples, hommes de sciences aux convictions républicaines progressistes bien affirmées, démarche classificatoire et pensée inégalitaire vont de pair.

Broca entend doter l’anthropométrie de méthodes de mensuration rigoureuses et normalisées grâce à des instruments perfectionnés, utiliser les procédés mathématiques et statistiques afin de faire entrer l’anthropologie dans sa phase scientifique. Afin de permettre aux non-scientifiques de participer à la grande entreprise de classification, Broca rédige des Instructions générales, qui présentent, en près de trois cents pages, les méthodes anthropométriques : les caractères à étudier, les modes d’utilisation des appareils de mensuration, les erreurs à éviter. Au sein de cette anthropométrie scientifique, l’étude du crâne tient une place de choix et l’œuvre de Broca constitue une référence pour plusieurs générations d’anthropologues français et étrangers.

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« Joseph Arthur de Gobineau, dit le comte de Gobineau, né le 14 juillet 1816 à Ville-d’Avray et mort le 13 octobre 1882 à Turin, est un diplomate  et écrivain français. Il doit sa notoriété posthume à son Essai sur l’inégalité des races humaines (1853-1855), qui le range parmi les pères de la pensée racialiste. » Source : Wikipedia

Anthropologie et perfectibilité

 

Dans son article « Anthropologie » du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, Broca présente la position officielle et quasi consensuelle de la science anthropologique à propos de la perfectibilité des prétendues races humaines : « Il y a des races éminemment perfectibles, qui ont eu le privilège de devancer les autres, et d’enfanter de grandes civilisations. Il en est qui n’ont jamais pris l’initiative du progrès, mais qui l’ont accepté par force ou adopté par imitation ; d’autres, enfin, ont résisté à toutes les tentatives qu’on a pu faire pour les arracher à la vie sauvage, et cela suffit pour démontrer l’inégale perfectibilité des diverses races humaines. Un caractère aussi important que celui-là, un caractère dont les conséquences ont été immenses dans le passé de l’humanité, comme elles le seront dans son avenir, sera-t-il subordonné à ceux de la peau, des yeux ou de la chevelure ?

N’hésitons pas à répondre par l’affirmative. […] Le défaut de perfectibilité n’indique pas l’absence de ces facultés, mais seulement leur impuissance à maîtriser les penchants et les instincts qui maintiennent l’homme à l’état sauvage, et, suivant que les circonstances extérieures, les difficultés ou les facilités de l’existence, la douceur ou l’âpreté du climat, sollicitent plus ou moins les efforts des intelligences, des peuples de même race, et doués par conséquent d’un égal degré de perfectibilité, peuvent manifester cette perfectibilité d’une manière extrêmement inégale. […] il y a des cas où le passé est de nature à ne laisser aucune illusion sur l’avenir. Ainsi jamais un peuple à la peau noire, aux cheveux laineux et au visage prognathe, n’a pu s’élever spontanément jusqu’à la civilisation ; les Nègres d’Afrique, qui sont pourtant loin d’occuper le dernier rang de la série humaine, n’ont jamais su donner à leurs sociétés la stabilité qui est la condition essentielle du progrès ; et on n’a jamais vu rallier en nation les tribus sauvages des Australiens et des Nègres pélagiens (ou mélanésiens) ».

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« Le comte Georges Vacher de Lapouge, né le 12 décembre 1854 à Neuville-de-Poitou (Vienne) et mort le 20 février 1936 à Poitiers (Vienne), est un anthropologue français. Magistrat, puis bibliothécaire, il est un théoricien de l’eugénisme  et une figure de l’anthroposociologie. »

Des thèses qui ne feront pas l'unanimité

Si les naturalistes par leurs études anthropométriques ont largement participé à l’essor d’une pensée raciale hiérarchique, tous n’ont pas conclu à l’inégalité biologique et définitive.

Par exemple, Etienne Serres (1786-1868), titulaire au Muséum d’Histoire Naturelle de la chaire d’anatomie et d’histoire naturelle de l’Homme, devenue chaire d’anatomie comparée ; Bory de Saint-Vincent (1778 – 1846), Johan Friedrich Blumenbach (1752 – 1840) formulent tous des propositions de classification (ce dernier proposa de diviser l’espèce humaine en cinq races : la race caucasienne ou race blanche, la race mongole ou race jaune, la race malaise ou race marron, les nègres ou race noire, les américains ou race rouge).

Ils croient à la perfectibilité des hommes les plus inférieurs.

Friedrich Tiedemann (1781-1861), professeur d’anatomie et de physiologie à l’université de Heidelberg conclut, à la suite d’une série de mesures de boîtes crâniennes, que les structures du cerveau du Blanc et du Noir sont identiques et qu’il est donc impossible d’affirmer l’infériorité des facultés morales et intellectuelles des races noires.

De l'engouement à la désillusion

Bénéficiant d’un véritable engouement à ses débuts, l’anthropométrie est pourtant assez vite objet de désillusions et s’avère incapable d’aboutir à une classification des prétendues races humaines. Dans ces classifications, le nombre de prétendues races décrites varie de 3 à plus de 400, en passant par presque tous les intermédiaires possibles. Quels que soient les noms dont on affuble ces prétendues races (xanthodermes, caucasoïdes, etc.), les classifications se ramènent presque toujours à décrire les « Blancs », les « Noirs » et les « Jaunes », dans l’objectif de justifier la supériorité des premiers sur les autres.

Plusieurs obstacles, l’absence d’unification des méthodes de mensuration au sein de la communauté internationale, l’impossibilité de trouver des critères de différenciation suffisamment pertinents, la multiplication des types intermédiaires, forcent les savants à conclure que la classification des races humaines s’avère beaucoup plus compliquée que celle des autres espèces animales. Si l’observation des individus permet de percevoir des différences, il s’avère impossible d’établir des critères scientifiques qui permettent d’étendre le travail de classification à toute l’humanité.

Lorsque l’anthropologue compare les caractères physiques du sujet vivant ou du squelette, recherche des corrélations, regroupe des caractères variant dans le même sens afin de constituer des types distincts, il se retrouve face à de nombreux types intermédiaires : « La similitude absolue est impossible à établir », avoue Paul Lester, sous-directeur de laboratoire au Muséum, « il n’y a pas deux individus absolument semblables et, par un phénomène paradoxal, plus nous considérons de caractères, plus nous les exprimons de façon précise, moins il sera possible de trouver des types absolument semblables. On arrive ainsi à une véritable pulvérisation des types raciaux […].

« La race est donc indélimitable, on ne peut établir de façon précise les contours, et chacune passe par des transitions insensibles […]. » (Lester et Millot, 1936, p. 37-38). Si les anthropologues de l’entre-deux-guerres sont nombreux à faire état des difficultés, aucun ne conclut néanmoins à l’aporie des recherches et l’anthropométrie est encore largement pratiquée dans une optique classificatoire, notamment dans le monde colonial.

Monogénisme versus polygénisme

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S’il fut intense, le débat entre monogénistes (1)  et polygénistes (2)  n’a jamais radicalement remis en cause le principe de la prétendue supériorité de la race blanche. Alors que les polygénistes ont clairement animalisé les prétendues races inférieures et nié leur perfectibilité, les monogénistes ne déduiront pas de l’unité un principe d’égalité et furent même loin d’affirmer unanimement la perfectibilité des prétendues races primitives.

 

De la tradition chrétienne au débat scientifique

 

Alors que la doctrine de l’unité de l’espèce humaine se rattache à la tradition chrétienne, des éléments de polygénisme sont présents chez les auteurs des XVIe et XVIIe siècles (les races « pré-adamiques »), mais c’est aux XVIIIe et XIXe siècles que le débat sur les origines de l’Homme oppose très nettement les deux théories : les monogénistes pensent les prétendues races humaines sous le signe de l’unité d’origine tandis que les polygénistes défendent l’idée d’espèces séparées aux origines différentes.

 

L’émergence du polygénisme

 

En Angleterre, James Hunt (1833-1869), le fondateur de la Société d’anthropologie de Londres en 1863, diffuse les thèses polygénistes. En France, la doctrine polygéniste qui émerge, comme sous la plume de Jean-Baptiste Bory de Saint-Vincent (1778-1846), de Louis-Antoine Desmoulins (1794-1828) et de Julien-Joseph Virey (1775-1846) va de pair avec les premières recherches d’anatomie comparée qui animalise les prétendues races primitives.

 

Le maintien de la tradition monogéniste

 

Buffon maintient une tradition monogéniste non religieuse en défendant l’idée de perfectibilité de l’homme et en expliquant la primitivité des races par l’idée de dégénération. Le médecin anglais monogéniste James Cowles Prichard (1786-1848) voit dans le climat et l’évolution sociale les facteurs qui ont amené l’homme noir à l’origine à blanchir, liant ce blanchiment à la perfectibilité de l’espèce.

 

Une controverse qui ne remet pas en cause l’infériorité des prétendues races primitives

 

En France, la controverse scientifique entre monogénistes et polygénistes culmine dans les années 1850-1860. L’ « école du Muséum », autour d’Etienne Serres (1786-1868) puis d’Armand de Quatrefages (1810-1892), perpétue la tradition monogéniste tandis que l’ « école de Broca » reprend les thèses polygénistes.

Si les monogénismes soutiennent plus facilement l’idée de perfectibilité, certains sont aussi proches des visions dépréciatives des prétendues races inférieures défendues par les polygénistes. Le monogéniste Sir William Laurence, médecin au Royal College of Surgeons de Londres, a ainsi une vision des « races inférieures » très dépréciative et similaire à celle des polygénistes. Il est un des premiers anthropologues à défendre l’idée de l’inégalité des prétendues races en Europe en affirmant la supériorité des Celtes et des Germains sur les Slaves et les Orientaux.

 

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(1) « Les monogénistes, chrétiens convaincus, ennemis de Darwin et de sa théorie de la sélection naturelle, main sur la Bible, estiment qu’Adam et Ève sont l’unique origine de l’homme. Alors, pourquoi et comment ces deux ancêtres originels et leurs deux enfants ont-ils eu des descendants de plusieurs couleurs ? Très simple, répliquent-ils. L’expulsion du paradis a conduit certaines hommes (les Noirs) à une dramatique dégénérescence, tandis que d’autres (les Blancs) n’ont subi que des dégâts sans gravité. Le péché originel aurait donc touché davantage les Noirs que les Blancs. » Mes Etoiles Noires, p. 142

(2) L’autre courant est celui des « polygénistes », libres-penseurs et «progressistes». Ce qu’ils défendent, ce sont les « vraies » valeurs républicaines. Pas question d’adhérer aux idées bibliques ni à celles, réactionnaires et aristocratiques, exposées par Gobineau dans les quatre volumes de son Essai sur l’inégalité des races humaines ; leur approche est moderniste, républicaine et démocratique. Ils se posent à l’avant-garde des recherches et des théories scientifiques, et ils osent défier la Bible en affirmant que les Blancs et les Noirs sont des races différentes.  Mes Etoiles Noires, p. 142

(3) Broca, 1866, 1989, 9
(4) Ibid. 4-6
(5) Cf. Chapitre 2, La République raciale, Carole Reynaud Paligot, Editions PUF, Octobre 2006
(6) Broca [1886], 1989, 5.
(7) Ibid, p.6
(8) Ibid p13.
(9) Ibid. p.10 – 41.

Le polygénisme réfuté

monogénisme_versus_polygénisme

 

Le polygénisme consiste à considérer que l’homme a plusieurs origines. Il était en général défendu par les partisans de l’existence de prétendues « races » humaines bien distinctes.

 

L’Homme, fossile vivant

 

Les humains modernes d’il y a cent mille ans étaient sans doute rares : quelques centaines de milliers ou quelques millions au plus.

La thèse la plus probable est que les sept milliards d’humains actuels descendent tous de ces premiers modernes.

Le patrimoine génétique des Hommes actuels est une formidable source d’information sur le passé de notre espèce ainsi que sur celui de nos ancêtres animaux, aussi lointains et primitifs qu’ils aient été.

Chacun de nous possède 3 milliards d’informations génétiques, dont la plus grande partie porte des traces des modes de vie et de l’histoire de nos ancêtres.

Nous sommes donc tous, d’une certaine manière, des fossiles, mais des fossiles vivants, contrairement aux vieux os des paléontologistes!